mardi 2 juin 2009

Sur d'autres airs - Babooshka / La nuit je mens.

Lu par ailleurs dans "Sur un air de..."
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"Je n'ai jamais été bon en rythmique anglaise. Tu comprends quelque chose à la chanson", dis-je en me tournant vers Laurent, mon partenaire de nuit.
"Tu sais, moi non plus, alors je pige rien à ce qu'elle raconte..." me répond-il, tout aussi simplement, aussi sûrement que l'on entend le verre se briser sur le sol.

"Babooshka" nous accompagne donc, pour ce début de nuit. Il est déjà une heure trente. "She wanted to test her husband..." avance Kate Bush. Et puis après toutes les paroles s'embrouillent et je n'arrive à capter que quelques mots, par-ci, par-là... Rageant... Alors, je fredonne et marmonne au fur et à mesure des vitesses passées. Les rues de Paris semblent vidées de toute présence. Etrange. J'en fais la remarque à Laurent. Il ne fait qu'opiner, limite à grommeler, comme si je le tirais de sa torpeur nocturne. C'est aussi cela le travail en équipe. "Babooshka-ya-ya"... Verre brisé!

01 heure 33. Alors que nous naviguons sur le boulevard Haussmann, la radio crache une info. Un clochard aurait appelé le central pour signaler un fait suspect dans le Parc de Monceau. "Ca tombe bien, nous sommes à deux pas. Laurent, répond qu'on y go!"

"Central, ici BRI 735, nous filons sur Monceau. C.R. dès découverte du fait suspect.", arrive à articuler avec une pointe d'excitation mon collègue alors que je m'engage calmement sur Courcelles avec néanmoins ce deux-tons générateur d'adrénaline. Il faut ce qu'il faut. Pas de quoi réveiller les voisins, comme je le mets en sourdine.

Arrivés sur les lieux je demande à Laurent de rester à proximité du véhicule et je décide d'aller seul dans le parc. Holster dégrafé, la main sur mon automatique, j'avance. Ma lampe éclaire le chemin... Je tente de suivre les indications laissées par le SDF découvreur. Soudain, une chanson, je ne sais pour quelle raison, m'envahit la tête. "La nuit je mens". Comme Bashung, "j'ai dans les bottes des montagnes de questions". Que vais-je trouver? Où? Dans combien de temps? Et cet "écho... dans ma boîte crânienne".

Après quelques minutes de pérégrinations hasardeuses, finalement, je tombe sur un banc. La peinture y est écaillée. Passée. Au milieu, couchée, une petite vieille. Sans bruit, j'avance. Je me penche et vois la réalité d'une nuit sans âme qui vive. La vieille dort d'un repos éternel. Elle porte de part et d'autre de son cou des marques de strangulations. Quoique légères elles laissent tout deviner de la scène. J'avertis mon coéquipier. "Laurent, appelle une ambulance. On a un macchabée. Femme d'environ 70/75 ans. Morte par étouffement. On l'a étranglée. Terminé."

Je reste là, planté. Attente des secours qui ne serviront à rien. Mes bottes restent pleines de questions. La nuit aidera à avancer.

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